Les services des impôts pourront désormais surveiller Facebook, Instagram, Twitter et Le Bon Coin : l’Assemblée Nationale vient de voter cette mesure controversée dont le but est de mieux lutter contre la fraude.
Les députés ont choisi d’ignorer les réserves de la CNIL qui parlait pourtant d’une mesure « potentiellement liberticide ». Voici ce que cela signifie concrètement.
Le ministère de l’Economie et des finances pourra désormais espionner l’activité publique des administrés sur Facebook, Twitter, Instagram et les réseaux sociaux dans leur ensemble ainsi que des plateformes comme Le Bon Coin, eBay et Airbnb pour mieux lutter contre la fraude fiscale.
Les députés ont en effet adopté l’article 57 du projet de loi de finance pour 2020 mercredi 17 novembre 2019. Article qui permet la surveillance de ces plateformes avec des programmes informatiques, en particulier l’intelligence artificielle.
La surveillance des réseaux sociaux par les impôts et les douanes n’est pas une nouveauté.
Un dispositif qui se veut proportionné
D’ailleurs, la redoutable IA de Bercy a déjà permis de récupérer plus d’un demi milliard d’euros de fraude en 2019.
La différence, c’est que jusqu’ici la collecte n’avait lieu qu’au cas par cas, de manière ciblée, en cas de soupçons de fraude.
Désormais il s’agit bien d’une « collecte générale préalable » comme l’affirme la CNIL, autrement dit tout ce que vous posterez sur les réseaux sociaux pourra être immédiatement croisé et analysé et vous exposer à un contrôle fiscal.
L’administration estime avoir besoin de ces nouveaux moyens face à la sophistication de la fraude. Il y a néanmoins des gardes fous. Le premier d’entre eux, c’est que cette méthode ne permettra que de déceler trois types d’infractions :
Domiciliation fiscale
Activités non déclarées
Activités liées à de l’économie souterraine
Le second garde-fous, c’est que toutes les données ne seront pas traitées de la même manière.
Ainsi les données personnelles jugées sensibles, comme les convictions politiques, religieuses et l’orientation sexuelle, ne pourront pas être conservées par l’administration fiscale plus de 5 jours. Aucun sous-traitant ne pourra accéder aux données collectées par l’administration fiscale.
Date d’entrée en vigueur probable le 1er janvier 2020
La mesure entrera en vigueur dès la promulgation et publication au journal officiel du projet de Loi des finances 2020. La plupart des mesures du PLF 2020 devraient ainsi entrer en vigueur au premier janvier 2020 – à condition néanmoins que le Conseil Constitutionnel ne retoque ou ne censure pas certaines mesures du texte.
Les députés ont en effet choisi, en première lecture d’ignorer les réserves de la CNIL. La Commission nationale de l’informatique et des libertés avait pourtant dénoncé en septembre les risques liberticides posés par cette surveillance. et déploré l’émergence d’une « collecte générale préalable ».
Nous nous faisons également echo d’un avocat qui estime également que ce genre de surveillance est « liberticide ».
Par ailleurs, nos confrères de NextInpact rapportent que le Conseil d’Etat ne pense pas que l’article 57 ait sa place dans le PLF 2020 car il ne « concerne ni les ressources ni les charges de l’Etat » et aurait pu faire l’objet d’un simple décret. Ce qui renforce la perspective d’un retoquage.
Expérimentation de 3 ans
Néanmoins les sages pourraient tout de même se satisfaire du texte dans la mesure où il s’agit d’une expérimentation pour une durée de trois ans. Expérimentation qui pourra être renouvelée ou non en fonction des résultats de cette collecte.
Mais en cas de succès, il n’est pas impossible que le périmètre de cette collecte et les infractions contrôlées soit étendu.
Bien sûr, la meilleure façon d’échapper à un contrôle fiscal est de remplir correctement ses déclarations et de bien vérifier l’exactitude des données communiquées.
Mais il faudra également se méfier désormais de certaines photos potaches, ou de votre vie rêvée sur Instagram que vous aviez pris l’habitude de mettre en scène. Histoire d’éviter tout malentendu.
Source: www.phonandroid.com